REPORTAGE. Lamballe. Avant le festival Noir sur la ville, ils illuminent les vitrines de citations

Ouest-France, le 31 octobre 2019, Soizic QUERO.

Perchée sur un escabeau et armée d’un marqueur jaune entre les doigts, Martine Crenan, bénévole à la Fureur du noir, écrit une citation de l’auteur brestois Ronan Gouézec sur la vitrine du magasin Proxlan, spécialisé en informatique, à l’entrée de la rue Leclerc.

Alain Le Flohic, président de l’association, lui dicte les mots. Ça percute. « Il opine, sourit aussi, il pense que la vie n’est qu’une suite continue de changements de programmes. » « C’est pas mal pour une boutique informatique », s’amuse Alain Le Flohic, dans un sourire. Ambiance automnale, mercredi 30 octobre, à travers les rues.

« Un moyen original d’occuper la ville »

À une quinzaine de jours du festival Noir sur la ville, la capitale du Penthièvre se pare de citations « polardeuses » sur 41 devantures commerciales. « Ce n’est aussi simple qu’au tableau », rigole l’ancienne institutrice, en déroulant les dernières lettres.

Dans sa poche, une petite serviette pour rectifier les petits dérapages. Pas le droit aux fautes. « C’est la troisième fois que l’on inscrit des phrases sur les vitrines, rappelle Alain Le Flohic. Avant, on écrivait sur les trottoirs. C’est un moyen original d’occuper la ville. On est déjà présent à la gare, à la bibliothèque, au haras… » En guise de point, il appose un autocollant à l’effigie de Noir sur la ville.

Deux autres tandems arpentent aussi le centre-ville pour mener à bien la mission. Le territoire est quadrillé. Pour la bénévole Caroline Guihard, c’est une bonne idée. « Au détour des rues, on voit les gens s’arrêter. Les phrases font discuter. Elles interpellent. »

Les dévoreurs de polars ont retenu une citation par auteur invité à cette 23e édition. Exemples : « La vie est un fil tendu et nous sommes des funambules » (Patrick Bent), « Les gens n’aiment pas qu’on sorte des cases, ça leur rappelle qu’ils sont dedans » (Marion Brunet), « Il n’y a pas de préparation à la guerre, il n’y a que des mensonges qui poussent les hommes à partir » (Frédéric Paulin), « Trop penser au passé, c’est le meilleur moyen d’y passer » (Jérôme Leroy) etc.

« Une ambiance un peu particulière »

Faire fleurir des citations, Martine Crenan « adore ». C’est une façon d’œuvrer à « la promotion de la lecture et des écrivains. C’est jouissif de mettre des phrases un peu partout, exulte-t-elle. Je rencontre des personnes qui font un circuit pour les lire. Une femme m’a même confié qu’elle les notait dans un carnet… »

Sur la vitrine du salon de massage Serendipity, ce sera la plume de l’auteur Pascal Dessaint : « Naître pauvre n’avait jamais empêché personne d’avoir de la jugeote. » La gérante Juliette Cornière adhère à l’initiative : « Ça contribue à construire une ambiance un peu particulière. Et le principe des petites phrases, c’est rigolo. » Le duo de bénévoles s’active. « On a un rythme à tenir », souffle Alain Le Flohic en marchant.

« Pourquoi se sent-on coupable quand on est une victime ? »

Quelques mètres plus loin, c’est au tour de Camille boutique d’entrer dans l’intrigue. Avec une question posée par l’autrice Sylvie Allouche : « Pourquoi se sent-on coupable quand on est une victime ? » Dans son dernier roman Snap killer, elle aborde la question du harcèlement sur les réseaux sociaux chez les jeunes.

Le débat est lancé entre les bénévoles et la commerçante Camille Lefort, à la tête du magasin de prêt-à-porter. « C’est d’actualité, abonde-t-elle. Les gens prennent le temps de regarder. » Une retraitée, canne à la main, passe devant et découvre la démarche. « C’est pas mal ! » Ici, on voit la vie en jaune et noir, les couleurs fétiches du festival.

 

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