Article du Télégramme - Publié le 21 mars 2022
Sixième volet de notre série lamballaise « L’entreprise en héritage » avec l’enseigne de vêtements Lecointre. La quatrième génération a repris le flambeau d’un commerce familial né en 1947.
L’histoire entre l’enseigne Lecointre et la rue Calmette débute en 1947. Jusque-là, Héloïse et Alexis Lecointre tenaient un café rue Saint-Jacques, à l’emplacement actuel du restaurant Entre-Nous. Dans l’arrière-boutique, le couple vendait du tissu au mètre et des vêtements de travail. L’essor de l’activité, et notamment le porte-à-porte en campagne, les pousse alors à déménager deux rues plus haut, face à la Maison du bourreau. Roger, l’un de leurs fils, est de l’aventure. Deux ans plus tard, Maurice, son frère âgé de 16 ans, les rejoint.
« En tant qu’indépendant, c’est beaucoup de responsabilité et de liberté dans le choix des collections. On remet tout en jeu à chaque saison »
« Dans ce magasin, ils proposaient des vêtements pour hommes et garçonnets, en majorité fabriqués en France », rembobine Sylvie Méheust, fille de Maurice. L’année 1969 est marquée par d’importants travaux d’aménagements au rez-de-chaussée des deux maisons contiguës, aux 9 et 11 rue Calmette. La petite famille, elle, loge dans les étages supérieurs.
Sylvie seule pendant dix ans
Une petite révolution intervient en 1976, avec l’ouverture d’un rayon jean pour femmes. Quatre ans plus tard, Sylvie, jeune diplômée d’études de commerce, fait son entrée dans l’entreprise où elle développe, avec sa maman Christiane, le prêt-à-porter au féminin. Deux vendeuses et deux retoucheuses complètent l’équipe. En 1994, la retraite sonne pour les époux Lecointre. Sylvie se retrouve seule à la tête du navire. « En tant qu’indépendant, confie-t-elle, c’était à la fois beaucoup de responsabilité et de liberté dans le choix des collections. On remet tout en jeu à chaque saison ».
En 2005, de retour d’Australie et bardé d’une solide expérience dans la vente, François décide de venir seconder sa maman, Sylvie, et reprend l’univers masculin. « L’idée était de donner une image plus moderne de l’enseigne, de développer de nouvelles marques, et de personnaliser l’esprit des lieux », résume-t-il. La clientèle s’élargit, le challenge se révèle payant. Au point que le jeune frère Thomas, après de multiples expériences dans différents groupes (Décathlon, Aasgard), envisage de prendre part à cet élan.
« En 2018, on a organisé une réunion de famille, détaille Thomas. Pour moi, il n’était pas question de reprendre la boutique femmes que tenait maman. Ensemble, on a décidé d’imaginer un concept store, et de prendre le contre-pied de l’image devenue trop classique de Lecointre, en adoptant le slogan « Stylé mais pas guindé », et en complétant l’offre déjà existante ».
Les retrouvailles entre frères
« Le Gendre idéal » ouvre en mars 2019. Voisin de pas-de-porte de « L’Homme par Lecointre », la boutique dégoupille les codes de vente tout en renouant avec l’ADN de l’entreprise familiale. Le vêtement tendance, éco-responsable et de qualité y est sublimé par la présence de produits locaux triés sur le volet (bière artisanale, luminaires, parfums, savons, etc.). Sur 300 m², les deux boutiques reliées par accès commun proposent deux gammes distinctes et deux ambiances différentes. Chaque mois, la créatrice Alisson de l’Atelier Influences vient scénographier de nouveaux thèmes de vitrines. L’esprit vif et novateur cartonne sur les réseaux sociaux, et attire une clientèle bien au-delà des Côtes-d’Armor.
« Notre grand-mère passe presque tous les jours. Elle nous dit gentiment quand un détail de la vitrine la chagrine ».
À la retraite depuis 2020, Sylvie a gardé une présence dans la société composée désormais de cinq salariés, dont une retoucheuse, et de ses fils cogérants. « Notre grand-mère Christiane passe presque tous les jours à la boutique, sourit François. Elle nous dit gentiment quand un détail de la vitrine la chagrine. Mais elle semble tellement heureuse de nous voir reprendre le flambeau ».
Photographie : Sylvie Méheust a transmis le flambeau familial et commercial à ses deux fils, Thomas et François, devenus cogérants des deux boutiques « Le Gendre idéal » et « L’Homme par Lecointre ». (Le Télégramme/Benoît Tréhorel)